J'ai une passion pour les résistants. Depuis que je vis à l'étranger, j'ai découvert la difficulté de la resistance face à son propre pays, à sa culture, à sa terre. Il est très dur de critiquer en profondeur sa patrie. En profondeur. Je ne parle pas des râleries tièdes contre le voisin du dessus qui sont notre spécialité héxagonale. Il est tout aussi difficile de critiquer avec intelligence et clairvoyance, sans tomber dans la vengeance personnelle ou la caricature grotesque.
Ces résistants, il y en a très peu dans mes deux pays. Peu en France, peu au Liban. Le premier reste drappé dans ses convictions et ses auto-mensonges, seules unanimités du pays. Le second manque de l'élément essentiel sine qua non: une vraie liberté d'esprit et de pensée.
C'est pour ça que j'aime Amos Gitaï. C'est pour ça qu'il faut aimer Amos Gitaï, comme dirait Truffaut. Parcequ'il jouit d'une triple liberté: celle du créateur qui étonne, joue, passe, traverse, dessine la ligne, la franchit, y revient, l'efface, invite, ferme, ouvre... Il possède aussi la liberté du juif: cette liberté, je l'imagine être celle de pouvoir se voir ici, et là-bas, maintenant, avant, plus tard, israélien, sédentaire, mais quand même errant car toujours errant. Enfin, il a la liberté de l'homme: celui qui convainc, qui crie, qui prend des risques physiques, qui est beau.
Je suis amoureux de mon ennemi. Parceque mon ennemi me regarde, m'écoute, apprend ma langue. Parceque je le fais rire. Parcequ'il me fait rêver. Je suis amoureux de mon ennemi car il possède ce que je n'ai pas. Je suis amoureux d'Amos Gitaï.
Et la preuve, est ici .